Premier événement du genre en Algérie, le Forum africain pour les affaires et les investissements a marqué l’évolution d’une économie algérienne plus ouverte sur ses voisins mais encore très protectionniste par tradition.

De l’avis de nombreux invités, et malgré la polémique médiatique (lire plus bas), le Forum africain pour les affaires et les investissements, premier événement du genre en Algérie, a été une réussite. Organisé dans le flambant neuf Centre international des conventions (CIC) de la capitale par le Forum des chefs d’entreprises algériens (FCE) en partenariat avec le gouvernement, l’événement, qui se tenait à Alger du 3 au 6 septembre, était doté d’un budget de 5 millions d’euros.

Une centaine de conventions économiques internationales y ont été signées dans de nombreux secteurs, notamment ceux de l’énergie, du financement, des infrastructures et de l’agrobusiness, lesquels constituaient les piliers de la rencontre. Plus de 3500 dirigeants économiques et politiques venus de 42 pays d’Afrique mais aussi d’ailleurs ont pu y découvrir, ou approfondir, des synergies propices au développement de la coopération Sud-Sud.

« Il est assez passionnant de voir réunis ici des Africains des quatre coins du continent, mais aussi des Chinois, des Européens et des Levantins, se félicitait le président franco-béninois d’AfricaFrance, Lionel Zinsou, au terme de la deuxième journée du Forum. Après Africa 2016 et le Africa CEO Forum de Jeune Afrique, « cela montre la très grande demande de se connaître, de trouver des fournisseurs, des clients, des fournisseurs de technologies et de financements ».

Mutation algérienne

« Les entreprises ont énormément besoin de contact entre elles mais le coût de l’information est très élevé sur le continent et rien ne pourrait remplacer ce type de contact direct, poursuit l’ex-Premier ministre du Bénin. Il faut aussi remarquer ce retour sur la scène de l’Algérie, déjà une des plus grandes économies du continent, avec un changement de modèle économique que l’on entrevoit qui va être beaucoup plus privé, financier, industriel et moins minier”.

Attirés par une puissance économique algérienne en mutation mais pour beaucoup méconnue, certains sont venus en curieux, à l’instar du Ghanéen Albert Ankrah, directeur du développement de la holding Jospong. « Nous avons des bureaux en Inde, à Dubaï et en Chine mais aucune autre base sur notre continent que notre siège à Accra, confie-t-il. L’Algérie, centrale en Afrique du Nord et qui développe des infrastructures de qualité, est un bon candidat ».

D’autres, déjà actifs dans plusieurs pays, y prospectaient de nouvelles opportunités comme Amor Habes, directeur général du groupe algérien Faderco, spécialisée dans l’hygiène corporelle. « Nous commerçons déjà avec la Tunisie, la Libye, depuis peu le Maroc et nos produits sont aussi présents en Côte d’Ivoire, au Bénin et au Togo mais le développement de nos activités subsahariennes est devenue une obligation pour notre entreprise qui a besoin de leviers de croissance hors de nos frontières”.

Incident protocolaire

Traditionnellement protectionniste, l’économie algérienne doit encore faire des efforts d’ouverture, en contractant des accords de libre-échange (ALE) et en facilitant l’accès au financement par exemple, soulignent les acteurs privés algériens qui voient un bon augure dans l’organisation de l’événement. « Ce forum n’est qu’un premier pas avant de faire de cet événement une véritable tradition », déclarait en clôture le président du FCE Ali Haddad, annonçant l’organisation une deuxième édition du forum en 2019.

Ombre à ce tableau prometteur, un incident au cours de la plénière d’ouverture a focalisé l’attention de la presse algérienne, quand Ali Haddad a pris la parole après le Premier ministre Abdelmalek Sellal, mais avant le ministre des Affaires étrangères Ramtane Lamamra, rompant l’ordre protocolaire. L’ensemble du gouvernement a alors quitté la salle sous les yeux intrigués de l’assistance.

Affront volontaire du FCE ou désaveu organisé du gouvernement à son président, les interprétations les plus négatives ont fleuri en une des journaux sans que l’on puisse savoir précisément le fond de cette affaire. Mais conclure d’un fiasco ou d’un ’“échec du premier forum d’affaires Algérie-Afrique” comme affichait le quotidien Le Soir en Une a semblé bien exagéré aux observateurs et aux participants étrangers venus pour affaires et qui ont peu relevé cette petite tempête politico-médiatique locale.

Par Laurent De Saint Perier in Jeune Afrique du 08 décembre 2016

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